Réforme de la justice : les enjeux pour les justiciables


La tournure que prend la justice actuellement n'a pas l'air de vous satisfaire. Vous avez notamment déposé une gerbe l'an dernier en hommage à la justice. La justice elle est morte?

 

Alors elle est morte ... pas tout à fait puisqu'il faut toujours être positif. Vous avez vu. Je vois que vous suivez l'information puisque ça date de l'année dernière. Depuis les choses ont évolué. Le projet de loi ce que l'on a appelé le projet de loi Justice est passé. Nous nous sommes légalistes en fait avec la loi. On l'a combattu de toutes nos forces. On n'avait pas été entendu par le législateur. Mais on a été entendus et suivis par le Conseil constitutionnel. Qui a annulé un certain nombre de dispositions que l'on contestait avec beaucoup de vigueur.  On n'a pas eu tort puisque le Conseil constitutionnel a supprimé cette disposition. La justice n'est pas morte. On va s'adapter ce que l'on regrette c'est que notamment en France. Le budget de la justice ne correspond pas aux standards européens. Et nous sommes en queue de peloton au niveau des pays européens. En ce qui concerne le budget le budget de la Justice

 

Qui en pâtit de cette réforme les avocats ou les contribuables.

 

Le justiciable joue un dernier exemple en matière il y a une réforme des pôles sociaux. Les pôles sociaux touchent les. Contentieux des personnes qui ont des handicapés qui ont eu un accident du travail qui réclament une pension qui sont en litige avec leur employeur et la sécurité sociale. Avec la réforme des pôles sociaux le délai d'attente à Lyon va être de plus de cinq ans ce qui est inadmissible et ce n'est pas l'avocat puisque l'avocat c'est son métier de faire des procès donc il est là pour 35 ans ou 40 ans. Il va faire ses procès.  Mais il est inadmissible qu'en France en 2019. Un justiciable attende cinq ans pour obtenir la reconnaissance de ses droits surtout sur des matières aussi fondamentales. Et ça touche les personnes les plus faibles. Les ouvriers qui ont des accidents du travail qui ont une main broyée qui perdent pied dans une machine. à attendre cinq ans pour avoir une indemnisation c'est inadmissible.

 

Puis il y avait un tribunal dédié pour ces affaires là et maintenant c'est passé où ça va passer au tribunal de grande instance

 

Très exactement c'est cela ça a été tout a été transféré au tribunal de grande instance. La ministre de la justice a estimé que c'était une simplification. Pour nous c'est une véritable catastrophe puisque ces tribunaux avaient déjà beaucoup de retard. Pour une raison très simple c'est qu'ils n'étaient pas pris en compte dans les statistiques des mines des tribunaux. Donc les délais étaient très longs parce qu'on n'en parlait pas au niveau de la chancellerie ça ne remontait pas. On savait qu'il y avait des délais mais personne ne se plaignait trop. Et aujourd'hui peut être qu'avec cette prise en compte dans le tribunal de grande instance peut être que les délais vont s'accélérer.  Mais pour le moment Lyon est en grande souffrance à ce niveau.

 

Vous pensez qu'il y a des alternatives à mettre en place des pistes de réflexion sur lesquelles on pourrait travailler ?

 

C'est très simple il faut augmenter le budget de la justice. Je vous l'ai dit le budget est un des plus faibles d'Europe. Il faudrait le doubler si on avait le standard allemand on pourrait rattraper le fonctionnement de la justice en France. On pourrait en deux ou trois ans rattraper le retard. On manque de greffiers on manque de juges. On a des juges qui sont en burn out. Ce qui est exceptionnel ça n'existait pas il y a dix ans. On a de nombreux magistrats qui sont arrêtés pour surcharge parce ils ont une pression de leurs supérieurs qui leur demandent de sortir les dossiers.  Donc on a une vraie souffrance au niveau des fonctionnaires magistrats greffiers.

 

Vous parlez du budget mais il y a aussi le modèle à revoir ou le modèle vous parait bien ?

 

 Il y a une inflation. Il faut savoir que les dossiers il y a une judiciarisation de la société. Avec notamment les assurances de protection juridique. Aujourd'hui on a beaucoup de procès qui n'existaient pas avant. Il y a ce qu'on appelle les petits litiges de droit de la consommation. Qui pourraient être réglés autrement. Malheureusement ces dossiers viennent encombrer le tribunal et on prend beaucoup de retard avec des petits.

 

Vous pensez que l'on va vers une justice des pauvres et une justice des riches ?

 

 A ce niveau-là c'est au niveau de la qualité de la Défense. Il est bien certain que lorsque vous prenez un gros cabinet d'avocat et que vous ne comptez pas les honoraires le temps qu'il passe les dossiers sortent si vous avez affaire à un avocat qui intervient au titre de l'aide juridictionnelle qui touche une indemnité forfaitaire. Il est bien certain que le temps passé même si l'avocat est consciencieux et fait son travail. Vous n'avez pas le même résultat. Imaginez quand vous allez dans un restaurant vous voyez bien la différence de prestation en fonction du de la note que vous payez.

 

Vous avez dit dans une interview pour Lyon Mag quelque chose qui nous a été à mon avis mal compris à propos de la réforme de la justice justement que la démocratie c'est d'avoir le courage d'aller contre l'opinion publique. Sinon ça s'appelle du populisme. Pouvez-vous préciser ?

 

 Les personnes qui sollicitaient le droit d'asile. Devaient être traité comme demandeur parce que c'était le cas où on a tout. Tous les réfugiés qui arrivaient des pays en guerre. Notamment je pense à la Syrie. Vous avez des gens qui ne venaient pas ce n'était pas de la demande d'immigration économique. C'étaient des gens qui avaient des situations. On a dansé dans ces personnes des médecins des architectes des avocats. Des gens qui avaient une situation qui avait même une certaine fortune une certaine aisance matérielle et qui ont dû tout abandonner parce qu'ils risquaient leur vie. Pour des raisons de confession de religion ou autre.  Et ces gens-là ne demandait qu'à une chose c'est pouvoir repartir. Et peut-être même pas rester en France. Tous ces gens-là ont été mis embarqués dans le même navire sans faire de jeu de mots malheureux. Ont été mêlés avec ce qu'on appelle l'immigration économique qui n'a rien à voir. Et il faut parfois que les hommes politiques aient le courage je pense à Mme Merkel qui l'a fait en Allemagne. De dire que ces gens-là doivent être accueillis. J'arrive je vous donne un exemple. J'arrive de Beyrouth au Liban la population. Le Liban a accueilli 1,2 peut être même 2 millions de Syriens. Sur une population de 2 millions et demi d'habitants. Ils ont failli être noyés. Ils les ont accueillis plus ou moins mais ils les ont quand même accueillis et ces gens-là repartent en Syrie au fur et à mesure en ce moment ils repartent à coups de 200 mille, trois cent mille personnes repartent. Ils sont venus se protéger et ce n'est pas une population qui est destinée à rester en France on a énormément parlé de cette population de ces demandeurs d'asile.  En fait c'est quelques dizaines de milliers de personnes. Donc on en a fait une montagne pour pas grand-chose.

Extrait de l'interview de Maître Farid Hamel Bâtonnier de Lyon

Lien vers la vidéo : Farid Hamel